Introduction
Habituellement, les rapports de la République démocratique du Congo (RDC) avec ses richesses naturelles sont stigmatisés en mettant l'accent sur « le paradoxe de l'abondance ». Malgré ses riches gisements minéraux, ses sols fertiles et ses vastes forêts, la RDC continue d'être l'un des pays les plus pauvres du monde. L'exploitation industrielle des ressources, minières, forestières ou agro-industrielles, profite rarement, voire jamais, au grand nombre formé des pauvres. En fait, cette exploitation éloigne ces derniers de leurs terres et compromet du coup leurs moyens-mêmes de subsistance en restreignant leur accès aux ressources naturelles ou en polluant forcément leur environnement.
L'une des raisons en est l’irrégularité dans la mise en œuvre des politiques et l'application des lois. Sur papier, il existe des mécanismes garantissant aux locaux des bénéfices (limités) de l'exploitation industrielle et qui devraient éviter une destruction irréparable des écosystèmes dont ils dépendent. Cependant, dans la pratique, ces politiques sont rarement appliquées. Facilement corrompues, les autorités censées de veiller sur leur application ferment souvent les yeux. Ces mêmes autorités, avec les services de sécurité et même judiciaires, court-circuitent les initiatives des communautés et de la société civile de tenir les entreprises responsables pour leurs actes.
Autour des sites d'extraction des ressources, de nombreux intervenants s’activent dans d’efforts pour le respect des accords et cadres réglementaires, y compris en matière de protection de l'environnement. Ces acteurs comprennent certains dirigeants locaux, des membres d'organisations communautaires et de la société civile et des journalistes. Autour des projets miniers, les mineurs artisanaux se mobilisent souvent eux aussi, car ils voient leur source de revenus et mode de vivre menacée. Ces défenseurs se battent simultanément pour protéger leurs moyens de subsistance, leurs terres, et leurs écosystèmes. Ils dénoncent, selon les cas, des sociétés d'exploitation forestière opérant hors normes, des miniers non respectueux de l’environnement ou des agroalimentaires utilisant des pesticides toxiques.
Dans cette série de blogs, nous nous focalisons sur la lutte de ces défenseurs de l'environnement et des moyens de subsistance et sur les risques auxquels ils sont exposés. Ils sont souvent menacés par des collaborateurs d'entreprises, notamment des politiques et des agents des services étatiques, surtout de sécurité et judiciaire, dont le soutien a été « acheté ». Ils sont recherchés, arrêtés et parfois détenus sur base des fausses accusations, inventées de toutes pièces. Dans d’autres cas, ils sont mêlés en des conflits avec d'autres membres de leur communauté qui ont des avis différents face aux entreprises opérant dans leur environnement. Malgré ces dangers, ils continuent courageusement leur combat, espérant à un avenir meilleur pour leur descendance.
La série de blogs est basée sur des recherches de terrain menées autour des concessions minières, forestières et d'huile de palme dans le Nord-est de la RDC (provinces de la Tshopo et de l'Ituri) dans le cadre d'un projet financé par le British-Academy sur « les défenseurs de l'environnement et les atmosphères de violence » (SDP2/100278).